L’avant-projet de loi qui acte « les mesures d’urgence » en réponse à la crise des « Gilets jaunes » envoyé aux partenaires sociaux

Les partenaires sociaux sont consultés le 17 décembre 2018 sur l’avant-projet de loi qui concrétise les mesures en faveur du pouvoir d’achat annoncées par Emmanuel Macron en réponse à la crise des « Gilets jaunes ». Le projet de loi définitif sera présenté le 19 décembre 2018 en Conseil des ministres.

Prime exceptionnelle de pouvoir d'achat de 1 000 €

Étendue de l’exonération. - L’avant-projet de loi détaille les modalités de mise en œuvre de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat qui pourra être versée par les employeurs (il n'y a aucune obligation pour l’employeur).

Cette prime serait exonérée, dans la limite de 1 000 € :

-d’impôt sur le revenu ;

-de toutes les cotisations et contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle (cotisations sociales, CSG, CRDS, AGIRC-ARRCO, assurance chômage, etc.) ;

-et de la participation à l'effort de construction, de la taxe d’apprentissage (y inclus contribution supplémentaire), des contributions à la formation professionnelle.

La prime serait également exonérée de taxe sur les salaires pour les employeurs concernés, en raison de l’alignement d’assiette avec la base CSG/CRDS.

L’exonération ne pourrait concerner que des salariés. Elle ne peut pas jouer pour une prime qui serait attribuée à un dirigeant sans contrat de travail, même affilié au régime général de la sécurité sociale, ni aux stagiaires.

Salariés ouvrant droit aux exonérations. - Cette exonération ne pourrait s’appliquer qu’aux primes versées aux salariés dont la rémunération 2018 est inférieure à 3 SMIC annuel.

En outre, il doit s’agit de salariés présents dans l’entreprise au 31 décembre 2018 (ou à la date de versement de la prime si elle est antérieure).

Le SMIC annuel de référence serait celui retenu pour le calcul annualisé de la réduction générale de cotisations patronales (ex-réduction Fillon), une notion bien connue des gestionnaires de paye. Il pourra donc varier selon les salariés : temps partiel ou pas, absences non rémunérées ou avec maintien partiel de salaire, entrée/sortie en cours d’année, etc. (c. séc. soc. art. L. 241-13, III, al. 2).

Date de versement. - En outre, la prime devrait être versée entre le 11 décembre 2018 et au plus tard le 31 mars 2019.

En dehors de ces bornes, il n’y aurait pas d’exonération.

Attribution et modulation. – L’employeur pourrait décider d’attribuer la prime à l’ensemble des salariés ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond.

Il pourrait également faire varier son montant en fonction du niveau de rémunération des bénéficiaires, de la durée de travail ou de la durée de présence effective dans l’entreprise pendant l’année 2018.

Modalités de mise en place. - L’employeur qui voudrait accorder cette prime exceptionnelle pourrait :

-soit procéder par décision unilatérale, mais il n’aurait alors que jusqu’au 31 janvier 2019 pour arrêter les modalités de la prime : l’employeur devrait informer les représentants du personnel de sa décision au plus tard le 31 mars 2019 ;

-soit conclure un accord d’entreprise selon les modalités prévues pour les accords d’intéressement (accord collectif classique, accord avec les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, accord au sein du comité d’entreprise ou du comité social et économique ou projet d’accord ratifié par les 2/3 du personnel).

L’accord ou la décision unilatérale fixerait le montant de la prime ainsi que, le cas échéant, le plafond limitant le champ des bénéficiaires et la modulation de son niveau entre les bénéficiaires.

Dispositif anti effet d’aubaine. - Afin de s’assurer que cette prime corresponde à une rémunération supplémentaire, l’avant-projet de loi précise que la prime ne pourrait en aucun cas se substituer à des augmentations de rémunération ou à des primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur dans l’entreprise, ni se substituer à des éléments de rémunération.

Réduction de cotisations salariales et défiscalisation des heures supplémentaires

Mesure avancée au 1er janvier 2019. – L’avant-projet de loi accélère la mise en œuvre de la réduction de cotisations salariales sur les heures supplémentaires et complémentaires prévue par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2019. Attendue à l’origine pour le 1er septembre 2019, la mesure s’appliquerait dès le 1er janvier 2019.

La réduction de cotisation couvrira les cotisations salariales d’assurance vieillesse et de retraite complémentaire, mais pas la CSG ni la CRDS, et sera applicable à la rémunération de l’heure supplémentaire ou complémentaire, ainsi qu’à la majoration de salaire qui y est attachée

Mise en place d’une exonération d’impôt. - Par ailleurs, en plus de cette réduction de cotisations salariales, la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires réalisées à compter du 1er janvier 2019 serait exonérée d’impôt sur le revenu, dans une limite annuelle de 5 000 €.

Signalons que les heures supplémentaires ou complémentaires qui auraient remplacé d’autres éléments de rémunération (comme une prime) sur les 12 derniers mois ne pourraient pas bénéficier de ces exonérations.

Rétablissement de la CSG à 6,6 % pour certains retraités

Depuis 2018, la CSG sur les pensions de retraite et d’invalidité est de 8,3 % (au lieu de 6,6 %), sauf pour les personnes concernées à avoir des revenus suffisamment modestes pour bénéficier d’une exonération de CSG/CRDS ou d’un taux de CSG réduit de 3,80 %. Cette hausse de 1,7 point n’a pas été compensée par une autre baisse de cotisations.

L’avant-projet de loi contient donc une mesure visant à créer une catégorie « intermédiaire » de retraités, avec une CSG calculée à l’ancien taux 6,6 % à partir du 1er janvier 2019. L’avant-projet de loi définit à cet égard les seuils de revenu fiscal de référence qui seront applicables.

Selon l’exposé des motifs du projet de loi, cette mesure concernerait environ 3,8 millions de foyers de retraités.

Hausse de 100 € des rémunérations au niveau du SMIC : un décret à venir

Dans une interview aux Échos parue le 17 décembre 2018, le Premier ministre a confirmé que la hausse de 100 € des rémunérations au niveau du SMIC s’effectuera via une hausse de la prime d’activité, versée dès le 5 février 2019 au titre du salaire de janvier, ainsi qu’un élargissement des bénéficiaires.

À cet effet, un amendement au projet de loi de finances pour 2019 a été adopté par les sénateurs, le 11 décembre 2018, visant à avancer au 1er janvier 2019 les bonifications de la prime d’activité qui devaient s’étaler jusqu’en 2021.

Sa mise en œuvre effective nécessite un décret d’application, qui devrait être prochainement dévoilé.

Les employeurs ne seront pas impliqués dans la gestion du dispositif. La prime d’activité est en effet une prestation versée mensuellement par les caisses d’allocations familiales (CAF) ou les caisses de la mutualité sociale agricole (CMSA). Elle est destinée à compléter les revenus des travailleurs modestes, qu’ils soient salariés ou non salariés (c. séc. soc. art. L 841-1). Dans tous les cas, le dispositif envisagé ne concernerait pas uniquement les rémunérations égales au SMIC et il serait tenu compte des revenus et de la composition du foyer (ex. : enfants à charge).

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